Mes voyages en Iran, en 2006 et 2018, étaient professionnels. J’étais invitée dans les deux cas par des universités pour faire une présentation sur les forêts naturelles, avec un focus sur les vignes sauvages.
2006 : l’île de Qeshm
En 2006, le lieu de la conférence était l’île de Qeshm. Cette grande île de 1295 km² est située au large de la côte sud de l’Iran, dont elle est séparée par le détroit de Clarence, à l’est du golfe Persique, dans le détroit d’Ormuz. Avec ses cent kilomètres de long, elle est la plus grande île iranienne et du golfe Persique. Le climat est tropical sec et très chaud.
Cette île possède plusieurs habitats remarquables, que nous avons visité durant notre séjour.
La mangrove de Hara
La mangrove de Hara, située sur l’île et sur la côte continentale opposée, bien visible sur la photo aérienne et la carte ci-dessus, occupe une superficie d’environ 20 km2. L’arbre dominant y est le palétuvier Avicennia marina, qui peut vivre, comme tous les palétuviers, dans les eaux salées en bordure de mer.
Comme toutes les mangroves, c’est un haut lieu de biodiversité pour le Golfe Persique, car l’habitat naturel de nombreuses espèces : hérons, flamants, pélicans, tortues, serpents et bien évidemment poissons.
Au cours de notre circuit, nous avons vu pélicans frisés et flamants (première photo à gauche), petit gravelot (au centre) et héron cendré (à droite). J’ai aussi pu observer le rollier indien, et le vautour percnoptère.
Cette mangrove est aussi très utilisée par les villageois, si bien qu’il y a des programmes de replantation des palétuviers. On y voit de beaux bateaux en bois et de nombreux poissons séchant en bordure de la mer.
Nous avons fait aussi un tour dans les villages. Au marché, j’ai vu plusieurs femmes avec des masques en forme de bec, forme traditionnelle du foulard islamique des tribus de Qeshm, qui leur cache tout le visage. Malgré la beauté de ces masques, il est évidemment très choquant, de voir cela, surtout par les chaleurs qui règnent sur cette île.
Les villages comprennent des tours traditionnelles de ventilation, une méthode utilisée depuis des siècles pour créer une ventilation naturelle dans les bâtiments. Il s’agit d’un capteur de vent qui fonctionne grâce à la faible différence de pression entre la base et le sommet à l’intérieur de la colonne. La différence de pression aide à remonter l’air chaud vers le sommet et à amener de l’air frais vers le bas de la colonne.
Le Géoparc, patrimoine mondial de l’Unesco
Ce géoparc fait partie de la longue chaîne de montage de Zagros, qui a été déformée et plissée à la suite de la dernière phase d’orogenèse alpine à la fin de l’ère Tertiaire. Les formations géologiques de cette ceinture de montagne datent de la période du Précambrien supérieur au Cambrien (plus de 480 millions d’années) et comprennent des diapirs de sel attribués à l’âge Précambrien.
Les paysages de ces formations sédimentaires sont presque sans vie apparente, mais c’est une fausse impression. Les arbres arrivent à s’implanter dans ce désert blanc. Ils perdent leurs feuilles une grande partie de l’année mais sont vivants et refleurissent lors des pluies.
Dans la partie ouest et sud de l’île, se trouve une grotte de sel, issue de ce diapir, et qui est la plus étendue au monde avec ses 6600 m de long. Les faibles précipitations sur l’île et la réduction de l’érosion hydrique ont prolongé la durée de vie de la grotte de sel. Cette grotte a été ouverte au public en 2006.
Nous en avons visité le début, mais ce qui était aussi impressionnant, était la rivière de sel qui en sortait
2014 : A la recherche de vignes sauvages dans les monts Alborz
Je suis retournée en Iran en 2014, à nouveau invitée par un collègue universitaire iranien, Alireza Naqunezhad, afin de participer à une conférence sur la vigne sauvage, et ensuite de rechercher des échantillons de cette espèce le long de la mer Caspienne et dans les forêts pluviales des monts Alborz (ou Elbourz). Cette partie de l’Iran bénéficie d’un climat chaud et humide grâce à la proximité de la mer Caspienne. Elle a été la zone refuge majeure de l’Asie occidentale pour la flore et la faune au cours des glaciations quaternaires, qui ont disparu d’Europe centrale et occidentale.
Une visite dans ces forêts dites pluviales tempérées était un vieux rêve pour moi !
La présentation a eu lieu à l’université de Balbosar, devant les enseignants et étudiants en thèse. L’accueil a été très chaleureux !
Puis nous avons parcouru divers sites du pays, et collecté des échantillons de vignes sauvages. Ces populations font partie de celles qui ont été domestiquées il y a près de 10 000 ans, dans un cercle englobant la Géorgie, l’Arménie et le nord de l’Iran. C’est dire si retrouver cette espèce dans son habitat naturel était émouvant.
Ci-dessous : deux photos de la forêt pluviale des monts Alborz
Ci-dessous : la vigne sauvage vue de près. A droite, une vigne sauvage sur les dunes de la mer Caspienne.
Nous avons aussi cherché la vigne sur les montagnes brumeuses de Asalem à Khalkhal dans la province de Gilan. Sur les pâturages, s’épanouit un superbe pavot.
Notre visite se poursuit au travers de l’Iran, avec une visite spéciale à l’hôtel International Ramsar International. Ce vieil hôtel a été construit avant la révolution iranienne, et c’est l’endroit où a été signée la convention de Ramsar pour la protection des zones humides.
Un petit séjour a été fait tout au nord est de l’Iran, dans de belles montagnes où vit encore le guépard. Ici, deux individus ont été tués par des bergers sans doute.
Une visite très agréable, grâce à des gens charmants, de la famille de Alireza
Félicitations, de tels reportages nous manquent beaucoup en France. Je tente pour ma part de reconstituer une biodiversité dans ma petite propriété, avec replantation de feuillus, reconstitution d’une pièce d’eau… Mais je suis bien petit. Ce serait merveilleux de pouvoir encourager d’autres propriétaires à en faire autant, mais les mentalités sont dures à remuer.
Continuez, ces idées finiront bien par se répandre.
Merveilleux, merci. Un tel reportage m’encourage à continuer à ma toute petite échelle d’amateur.
Vous m’avez fait mieux voir les Vosges pourtant maintes fois parcourues sac au dos avec les anciens du 1er Choc en pélerinage à Dabo ; vous m’avez amèrement fait regretté de n’avoir pas consacré une journée à Nysiros où j’avais eu la flemme d’aller depuis Kos alors que l’occasion s’en offrait, vous aviez encore mon envie de visiter l’Iran, d’où est originaire ma fiancée.
Merci pour vos magnifiques carnets de voyage 🙏🏻
Je rejoins les 3 précédents commentaires et c’est le 1er que j’écris. Merci
Très intéressants reportages, agrémentés de belles photos et riches de renseignements botaniques, géologiques et autres.
Concernant vos amis iraniens, en avez-vous des nouvelles au vu de l’épouvantable situation actuelle vis à vis des universitaires, femmes, intellectuels, etc?
non je n’ai plus de nouvelles car internet est coupé. Je sais juste que je ne peux malheureusement pas y retourner pour l’instant.